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Cultivons la curiosité

Bohemian Rhapsody

Bohemian Rhapsody

Comment parler de ce film ? Comment arriver à exprimer mon ressenti lors de la sortie de la salle, sans être trop injurieux ou béa ? Comment mettre en mots ce qui s'avère être le film le plus paradoxal que je n'ai jamais vu ? Queen est un groupe qui, depuis que je me souvienne, m'a toujours fasciné. Depuis que j'ai 12 ans j'écoute leur musique assidûment. Mais j'aimais bien avant, sans rien comprendre. J'ai encore un vague souvenir de la mort de Freddie Mercury, le 24 Novembre 1991. Des images à la télé passent rapidement dans ma tête. Pas de tristesse, à 9 ans on ne pige pas bien ce que la mort veut dire, mais pourtant la sensation qu'un immense artiste vient de s'éteindre. Mort qui me fera regretter de ne pas être né plus tôt, pour avoir la chance d'assister à un concert du groupe.

Ce n'est vraiment qu'avec la victoire de l'Olympique de Marseille en ligue des champions, en 1993, que je vais chercher à avoir un disque du groupe. Ce sera le "Greatest Hits". Avec évidemment "We are the champions", mais aussi le pêchu "We will rock you" que je chante en yaourt n'y pigeant rien à l'anglais. De ce que je me souvienne, Queen est le premier groupe que j'ai aimé en dehors des artistes de mon âge, à savoir Henri Dès, Dorothée ou Les Musclés. Je préfère ne pas parler de cette anecdote de ma mère, qui indique que je chantais en yaourt du Phil Collins dans ma petite enfance (genre 4 - 5 piges), je n'en ai aucun souvenir. Ceci pour vous dire que, même si paradoxalement je n'ai jamais possédé qu'un seul album du groupe ("Made in Heaven", que je n'ai plus à l'heure actuelle mais que je compte reprendre), j'ai toujours aimé Queen. Ma passion pour Nino Ferrer viendra peu de temps après si vous voulez tout savoir.

Donc c'est avec ce passif impressionnant (je ne vous cause même pas d'un exposé pourri que j'avais fait pour l'école sur le groupe), que j'ai appris qu'un film biopic consacré au groupe allait sortir en Octobre 2018. Pourtant le film possède une gestation complexe, avec Sacha Baron Cohen en acteur principal. Le projet capotera devant l'importance qu'accordera la 20th century fox à la présence de Brian May et Roger Taylor comme producteurs exécutifs. Ce qui assure un côté lisse au film, et donc une absence de réalisme effrayante. Huit années furent nécessaires pour mener à bien ce projet, qui au final, est réalisé par Bryan Singer. Pourtant, me voilà dans la salle, prêt à voir le film en VOSTFr, et surtout n'attendant rien du film. C'est donc parti pour 2h15.

Vidéo de "AuCiné".

Dois-je vous avouer que j'ai pris des notes à la sortie du cinéma afin de bien parler de ce film ? Mince, c'est fait. Alors le film parle surtout de Freddie Mercury, que Rami Malek interprète avec un talent immense, sa posture, sa façon de parler, son regard, l'acteur est juste exceptionnel ici, et ceci ne sera jamais cassé par une réalisation à jeter aux chiottes. Donc, on disait, "Bohemian Rhapsody" est en fait l'histoire de Freddie Mercury, né Farrokh Bulsara à Zanzibar. Et comme la vie du futur chanteur est liée à celle du groupe Queen, le film parle aussi du groupe. Seulement, dès le début on sent qu'un truc ne va pas. Tout va vite. Trop vite.

Alors que l'on sent le père de Farrokh un peu énervé de voir son fils sortir, encore, celui-ci ignore qu'il va vivre une soirée exceptionnelle. En effet, se rendant au concert des Smile, dont il suit la carrière de prêt, il va rencontrer sa future femme, Mary Austin, mais aussi profiter du départ du chanteur/bassiste du groupe pour prendre sa place. En 5 minutes chrono. Sans explication sur son passé, ses attentes, ses espoirs, ses rêves. Farrokh pousse la chansonnette sur le parking du bar, impressionnant Brian May et Roger Taylor. Bon, on passe sur le fait qu'ils ne lui demandent pas son numéro ou son adresse, et que quelques temps après ils se retrouvent tous pour répéter. Oh, au fait, entretemps John Deacon a rejoint le groupe, histoire d'avoir un bassiste, mais ça le scénario s'en branle.

Ah, j'avais dit que je resterai poli. Ce n'est pas gagné. Pourtant, si on peste contre un scénario rapide, une réalisation qui n'a ni queue ni tête (et pourrie), la bande son suffit à satisfaire la spectatrice et le spectateur. Le son est sublime. On se croit vraiment dans une petite salle de concert quand les Smile jouent, on ressent tous les instruments, quel bonheur. Malgré un départ délicat, le coup du micro ou les paroles non connues par "Freddie Bulsara" (qui a un nouveau prénom donc), le groupe commence à percer. Je l'ai déjà dit mais Rami Malek est sublime en Freddie. Les postures, et tout ce qui va avec, waouh. On notera que l'acteur de la série "Mr. Robot" est doublé pour les scènes de chants, ce qui est normal. Si le chant en lui-même n'atteint pas la puissance vocale de Freddie Mercury, Marc Martel s'en sort super bien, me faisant douter par moment sur le fait que ce soit une bande son du chanteur décédé ou le doubleur. Ceci est bluffant.

Enfin bon, on découvre le futur manager, son assistant Paul, mais aussi Ray Foster, le chef d'EMI. Et là je découvre que ce personnage est joué par Mike Myers, laissez tomber, je ne l'ai pas reconnu. Donc on assiste au premier tube du groupe "Seven Seas of Rhye" il me semble, avec cette puissance sonore incroyable. Puis vient le passage Top of the pops, et l'enregistrement de "Bohemian Rhapsody", pas aimée du tout par Ray Foster. J'ai apprécié le coup des radios, un titre de 6 minutes, impossible à diffuser. Ou alors ce passage de la chanson de Roger Taylor, dont j'ai paumé le nom, mais qui amène un peu d'humour sympa. Donc le groupe part enregistrer en campagne alors que "Killer Queen" a cartonné dans le monde, leur offrant une tournée étasunienne. Désolé, je ne sais plus trop la chronologie du film, mais c'était tellement mal réalisé que j'ai juste les scènes en tête et pas leur enchaînement.

Bryan Singer fait du gros caca, réalisant ce biopic comme on fait un film d'action. J'adore Michael Bay et son changement de plan toute les 1/2 seconde (j'abuse), mais ici, c'est pire. À refiler un mal de crâne incroyable. Cet effet de caméra traversant le bus, pour rien. Mais rien quoi. Donc ils enregistrent "Bohemian Rhapsody", avec les idées qui s'enchaînent, un John Deacon mis au rebut, un Roger Taylor qui offre un côté comique contre sa volonté avec les "Galiléo", scène insupportable au passage, et pourtant le groupe en ressort encore plus soudé, il semble du moins.

En parallèle le titre non voulu en 45 tours par EMI cartonne en concert (je parle de "Bohemian Rhapsody"), au fait on a eu droit au fameux "il n'y a de la place que pour une drama Queen" que l'on voit dans la bande annonce durant l'enregistrement, dialogue de merde inutile. Le ton n'est jamais bon, on passe de la rigolade au drame, sans aucun fil conducteur. Pire, l'ambiance sonore reste sublime, me faisant presque chanter dans la salle, mais on sent que le réalisateur coche des cases, genre il faut faire ce titre, et puis parler du fait qu'il devient gay, mais sans le montrer. Je ne me remets pas du plan sur la porte des toilettes des hommes. Que c'est naze, mais naze, c'est ridicule. On ne veut pas montrer qu'il est gay, mais bon, comme les gens le savent il faut bien faire des allusions à ça. Putain !

Et bon, pendant le passage à la campagne, Freddie (devenu Mercury depuis un temps), sera attiré par Paul, qui sera présenté comme le méchant pas gentil du film. Purée. Et que dire, toujours au même moment, de ce plan sur des... poules. Oui, pendant 5 secondes on voit des poules. Putain de merde ! Et re-putain de merde quand Bryan Singer fait un enchaînement entre les gallinacés et le chant du groupe ? Un fondu qui se veut rigolo mais que j'ai pris comme un crachat dans la gueule des fans du groupe. En même temps je suis peut-être con, mais c'est ainsi que j'ai ressenti ce passage.

Le moment sur "We will rock you" est excellent, mais pas assez poussé. Comme le sera tout le processus créatif du groupe. On survole ça alors qu'il y avait moyen de faire beaucoup, beaucoup, beaucoup mieux. Que dire du fait que lorsque le groupe a commencé à être connu, Freddie Mercury a instauré des règles. Pas de musiques synthétiques, ce sera toujours instrumental. Pas d'album solo non plus. Des règles qu'il sera le premier à violer. Ceci n'est JAMAIS dit dans le film. Putain de merde. Qui a écrit ce putain de scénario de merde ! Dans les cases à cocher il y avait la passion de Freddie pour l'opéra. Son amitié avec Montserrat Caballé ne sera JAMAIS évoquée. Bordel ! Pire, le coup du synthé sera abordé pour "Another one bites the dust", mais quid de la participation à la bande son du film "Flash" ?? Enfin bon, je ne parle même pas du logo Queen, à peine abordé (on voit un croquis rapide de Freddie), et oublions complétement les raisons qui ont poussé Freddie à se faire pousser la moustache en coupant ses cheveux. Putain, on zappe les 3/4 des trucs importants et on s'attarde sur une putain de lumière pour mieux montrer que la rock star se retrouve seule, la poussant dans les fêtes dévergondées et dans les bras du malsain Paul, qui se débarrassera du premier manager du groupe pour mieux avoir de contrôle sur Freddie.

On voit ainsi le chanteur sombrer dans l'alcool, la drogue, allant jusqu'à signer pour deux albums chez CBS Record, mais en solo. Et revenant la queue entre les jambes, atteint du SIDA, pour donner un concert d'exception lors du Live Aid de 1985, offrant un dernier quart d'heure au film qui me laisse sans voix. Si on passera la réalisation pourrie ici aussi, manquant de peu de gâcher ce moment magique (caméra sans cesse en mouvement, plans malvenus), la musique arrive et sauve tout. Le son. Putain le son de sa grand-mère quoi. Là c'est simple, j'étais déjà comme un fou avec les titres entendus, mais là, waouh. Les poils se hérissent, on ferme son claque merde et on apprécie le son, le chant mais aussi l'interprétation hallucinante de Rami Malek. Ce quart d'heure, à lui tout seul, sauve le film d'un naufrage, comme le Titanic esquivant de peu un iceberg mortel.

Pourtant il subsiste des défauts. Queen a créé le clip, créant par la même occasion MTV (ce sera à peine évoqué), après 1985, on ne sait rien, sauf la mort du chanteur. Le rideau de fer que le groupe fut le premier à franchir, la participation à des nombreuses OST (dont celle de "Highlander"), mais aussi le duo avec Montserrat Caballé, l'élaboration de "Made in Heaven", lourde de sens, et j'en passe encore. On assiste à 15 ans de vie de Freddie Mercury, et ceci offre de bon moment, mais il en manque. On pourra pardonner une mise en scène merdique, sur le rabibochage d'avec son papa, on pardonnera le fait que la tension au sein du groupe ne se voit absolument pas, May étant un Bisounours, Deacon un Casper, seul Taylor paraît un peu rebelle mais sera toujours rabaissé par Freddie, on ne sent pas une ambiance pesante comme on suppose qu'elle le fut.

Bref, si on ressort avec la banane car les 15 dernières minutes sont incroyables avec ce son, ces chansons, cette présence, argh, j'en perds mes mots, on se rappelle assez vite que nous venons d'assister à un gâchis. Réalisé avec les pieds, scénarisé avec le cul, on pourra regretter le fait que ce soit centré que sur Freddie Mercury, tant l'histoire du groupe est passionnante. Mais imaginons, ok, on ne s'attarde que sur Freddie. Pourquoi oublier ses 6 dernières années ? Pourquoi ne pas expliquer les raisons le poussant à assister aux concerts des Smile ? Pourquoi ne pas faire une scène clé sur son changement de look au début des années 80 ? Pourquoi avoir la mémoire si sélective sur des détails merdiques alors que son côté créatif est certes évoqué, mais pas aussi poussé qu'on le souhaiterait. Pourquoi ? Voilà la question. Non. Comment ? Comment arriver avec un tel matériau de départ, une telle bande son, un cast absolument magnifique (Rami Malek, Ben Hardy, Joseph Mazzello, Gwilym Lee, Lucy Boyton), comment arriver à se viander comme ça ? Comment ? Tout simplement en engageant un réalisateur de merde, qui fait de la merde avec un scénario de merde qui oublie trop de chose pour rendre l'hommage que Freddie Mercury méritait. Ce n'est pourtant pas consensuel, mais il y a trop de comédie, trop de sous entendus (d'un peu mieux le film ne montrait pas de baiser homosexuel), et surtout trop de manque pour en faire un grand film. Le film est raté, pourtant sauvé par son cast et sa bande son qui arrivent, un court instant, à faire oublier la merde devant laquelle nous sommes. Le dernier quart d'heure vaut la place. Surtout que le film passe super vite en fait (surtout quand on attend les années 85 à 91 en vérité). Dommage, mais ce film est sabordé par son réalisateur et un scénario haché. D'où le paradoxe, j'ai adoré les nombreuses chansons, la qualité du son, les actrices et acteurs, les 15 dernières minutes. Mais j'ai vomis les absences très nombreuses du scénario et la réalisation à chier. Comment peut-on passer rapidement sur le fait que Queen a créé le vidéoclip ? Et ceci n'est qu'une infime partie de ce qui est oublié ici. Du coup paradoxe. Un mauvais film mais un son exceptionnel. Je me répète, mais je ne sais pas si je dois vous le conseiller ou non, vous allez passer par toutes les émotions.... j'ai aimé et détesté à la fois. Oui, c'est possible.

@+

Bohemian Rhapsody
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