Cultivons la curiosité
Quand "Saw" de James Wan sort fin 2004, personne ne se doute qu'un genre nouveau est lancé dans l'horreur. Le film psychologique au twist impressionnant. On peut aussi revenir sur "Battle Royale", mais je préfère parler de "Saw", qui a mis en place les codes du film enfermant des personnages afin qu'ils confessent leurs pêchés à travers un jeu malsain pouvant ôter la vie.
"Doubt" de TONOGAI Yoshiki va transposer "Saw" à la jeunesse Japonaise. En quatre tomes il arrivera à jouer sur la peur d'être enfermé avec un meurtrier qui veut punir avant tout. Il y a aussi du Agatha Christie ici, dans la culpabilité des personnages, et le côté huis clos. Que ce soit une île coupée du monde par une tempête dans "Les dix petits nègres" ou un train en direction de l'Asie dans "Le crime de l'Orient-Express", vous avez l'idée du huis clos asphyxiant avec une ignorance de qui est le fautif (ou la fautive).
Ainsi, "Doubt" est avant tout un jeu sur téléphone portable, pas encore smartphone en 2007 (l'iPhone débarque tout juste), Rabbit Doubt. Chaque joueur et joueuse est un lapin que l'on peut personnaliser. Seulement, dans le groupe, un loup est caché. Le but du jeu est de démasquer le loup au plus tôt, car sinon celui-ci passe à l'action et tue les lapins au fur et à mesure. Jeu d'enquête frissonnante qui passionne la jeunesse, il se trouve que certain.e.s se rencontrent. Ce sera le cas de Yû, qui en plus d'avoir le même prénom que l'idol KIKKAWA Yû, est un lycée banal, sympa, et qui va embarquer son amie Mitsuki dans une histoire mortelle.
Yû attend avec Mitsuki ses ami.e.s de Rabbit Doubt. En expliquant à son amie le principe du jeu. Ainsi on rencontre Eiji, Haruka et Rei. Hajime n'est pas là, en retard à cause d'une urgence. Rei a du mal en public, et on comprend rapidement pourquoi. Une fois au karaoké, la petite bande s'amuse bien, on découvre une partie du passé de Rei. Et alors qu'une pause pipi s'impose, Yû se fait frapper par un drôle d'individu masqué par une tête de lapin géante.
Il se réveille dans un lieu inconnu, avec ses amis et aussi Hajime. Seulement, l'une des personne de la bande est morte, pendue. Dès lors une lutte contre la mort va débuter. Pire, il semblerait que ce soit un jeu malsain, comme Rabbit Doubt mais en vrai. Qui est donc le loup du coup ? C'est ce que les jeunes vont essayer de trouver.
C'est assez délicat d'en parler sans trop en dévoiler. Déjà, le scénario est haletant, captivant. Jouant sans cesse sur ce "doute" qui subsiste, qui peut bien être méchant. Pire, on s'aperçoit qu'à travers des phrases marquées sur le mur, les personnages sont visés. Il sont tôt ou tard commis un impair, une erreur. Pour Eiji c'est cette suspicion d'avoir tué quelqu'un dans une rixe, pour Haruka on l'ignore, mais à priori c'est une chose dont elle est loin d'être fière et qui la plonge dans la solitude. Le premier tome réunit 4 chapitres tandis que le deuxième en offre 5.
Si l'intrigue se pose à la perfection, avec l'insouciance du début qui fait rapidement place à l'horreur de la situation, on fait rapidement le tour du bâtiment. L'auteur offrira même un plan en fin de premier tome. Histoire de savoir où nous en sommes. Le dessin est excellent, rien à redire là dessus, en plus il n'y a pas trop de fan service alors que l'auteur aurait pu en mettre. Ah, pour moi fan service signifie culotte. Ici c'est sobre. Même dans les cadavres l'auteur reste sobre. Ceci offre le petit frisson sympa sans dégoûter.
Malheureusement les données sont trop peu nombreuses pour que l'on puisse commencer à enquêter avec les victimes. Pourtant, le récit reste captivant, qui est ce septième personnage empoisonné ? Comment sortir d'ici ? Les personnages n'ont pas encore compris le mobile de leur présence ici. Si l'action n'est pas immense, la tension est bonne sans être malsaine ou asphyxiante. Même quand Yû croit être attaqué par le loup. Il se trouve que le tome 2 se lit très rapidement. Mais pourtant reste agréable à parcourir.
En fait je tourne en rond car trop en dire serait mauvais pour le manga. Les personnages sont attachants et réagissent normalement. Avec la méfiance que cela implique, et la peur de cet enfermement sans comprendre (au début), pourquoi ils sont là. Un récit qui happe sans problème et qui est très agréable à parcourir. Après le manga a 10 ans, donc avec "Saw" et ses nombreuses suites, sans parler de ce qui a pu se faire dans les autres médias, il est vrai que ce manga paraît classique. Pourtant je ne vois pas d'indices permettant d'en deviner le méchant (je crois que je me souviens de l'identité du loup). C'est bien foutu, et j'ai aimé le parcourir. On verra la suite et fin dans ce mois spécial mangas et comics, donc il vous suffit d'être un peu patient.e, non pas pour que je vous révèle qui est fautif, mais pour savoir si l'auteur aura réussi, jusqu'au bout, à tenir en haleine le lecteur que je suis. Pour l'instant c'est très bon.
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