Cultivons la curiosité
C'est en 2018 que sort en France chez Urban Comics un cross over, ou, comment dire, une aventure commune entre Batman et les Tortues Ninja. Pendant 170 pages, nous allons donc voir comment le scénariste Matthew K. Manning arrivera à cette prouesse de faire se croiser les 4 chevaliers d'écailles et de vinyles de New York avec le chevalier noir de Gotham City. Jon Sommariva ayant la difficulté de rendre homogène les 2 mondes.
Normalement, cette aventure fait partie de la collection Urban Kids et peut-être lue à partir de 6 ans. Ici, nous avons une version éditée par France Loisirs, d'où l'absence du logo Urban Comics sur la couverture. Cette dernière est souple d'ailleurs, et le format (17 x 24 cm) est un peu inférieur au A4 classique. Et il tient bien en main en permettant de voir le détail des dessins des cases. D'ailleurs, tout est en couleur, et les pages sont épaisses et solides. Le livre en lui-même est de grande qualité.
On retrouve le style graphique épurée du Batman de 1992. Oui, bon, je dis ça sans vraiment m'y connaître. Mais le trait de l'homme chauve-souris rappelle celui du dessin animé de cette période. Les Tortues sont plus proches du design Nickelodeon, qui possède les droits. On a donc des héros vraiment adolescents, avec leurs traits et caractères distincts. On ne tarde pas à accrocher à ce style graphique, et l'histoire se met rapidement en place, avec des portails remémorant ceux des Krangs, ennemis des Tortues, qui emmènent des monstres inconnus.
Ceux-ci sont en fait issus de l'univers de Gotham City, forçant les Tortues à s'employer d'entrée afin de se débarrasser de l'un d'entre eux. Seulement, le premier chapitre s'achève par l'arrivée du duo Joker/Harley dans les égouts de New York. Laissant présager d'un futur chaos dans l'univers des Tortues.
En parallèle, on suit l'enquête de Batman, qui constate que les "vilains" se sont tous échappés de l'asile d'Arkham. Cette histoire sent mauvais, très mauvais. Le chevalier noir va partir avec Robin (version Dick Grayson) et Batgirl dans un de ces portails. Et là, tout ce petit monde va devoir rétablir l'ordre en affrontant leurs ennemis communs. Le Joker est arrivé à prendre le contrôle du Foot Clan en neutralisant Shredder avec un gaz hilarant et sème le chaos dans New York.
En tout, nous aurons 6 chapitres, ou épisodes comme ils sont nommés dans ce livre, et nous verrons beaucoup de monde. Pas de violence outre mesure, pas de sang, mais ça ne nous empêche pas d'avoir droit à un lot soutenu d'action. Le découpage de l'histoire est malin, avec des retours en arrière pour comprendre comment tout ceci est devenu possible. Il y a juste une chose que je n'ai pas bien comprise à la fin, le retournement de Crane, mais le reste fonctionne.
Par contre, je trouve que pour des enfants de 6 ans, certaines scènes peuvent être impressionnantes. Les hallucinations horribles provoquées par l'Épouvantail peuvent effrayer les plus jeunes. Après, le reste est soft (désolé, je n'ai pas le mot français) et l'aventure est agréable à suivre, que l'on ait 6 ou 40 ans (voire plus). On y apprend qui sont les personnages des 2 univers, et je trouve que c'est une excellente porte d'entrée dans le monde des comics book.
Le scénario est plus un prétexte pour faire se battre les différents héros contre des ennemis qui ne sont pas de leur monde, mais ça fonctionne. Il est plaisant de voir April et Batgirl se battre à armes égales avec les autres. Même si elles se retrouvent à devoir taper une autre femme. Dans l'ensemble ça passe et il n'y a pas de sexualisation outre mesure, hormis un Donatello un peu trop lourd avec Batgirl.
Il est plaisant aussi d'avoir un petit bond temporel sur la fin, permettant d'introduire le Robin version Tim aux Tortues, ainsi que Nightwing. L'histoire se lit bien, le dessin est hyper joli, fouillé tout en étant simple. Les couleurs sont à la fois sobres et pourtant parfaitement bien choisies et avec des belles nuances. Ah, si, il manque Casey Jones, Splinter en sert à rien, et Shredder est sous exploité. Mais c'était difficile de tout faire rentrer en 170 pages.
Euh, 170, moins en vérité, car il faut compter les pages bonus qui montrent de très jolies couvertures alternatives et des planches crayonnées. Le genre de petit plus qui fait toujours plaisir à parcourir en fin d'œuvre
Pas indispensable, c'est pourtant une belle première aventure qui nous est ici contée. Bien dessinée, pas stupide du tout, c'est un plaisir de voir cette réunion improbable se dérouler sous nos yeux. Le scénario est accessible à tout le monde, que vous ne connaissiez que l'un des deux univers, voire aucun des deux. Pas trop violent, malgré quelques images un petit peu impressionnantes pour les plus jeunes (ceci reste mon avis). Pour une dizaine d'euros, ça reste une BD sympa à lire, et on constate que les deux mondes ne sont pas aussi incompatibles que ce que nous aurions pu croire. J'ai vraiment bien aimé.
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