Cultivons la curiosité
Oh, voici la fin d'une série pourtant pas longue en tomes (oui, seulement 3), mais que nous aurons mis un certain temps à finir. Il faut dire que naBan éditions n'a pas fait les choses à moitié pour localiser cette grande œuvre des années 70. 300 pages, un papier de qualité, une couverture sublime. La mangaka TAKEMIYA Keiko voit son récit atteindre la France dans un magnifique écrin. Et, disons-le d'entrée, pour un tarif défiant toute concurrence. Avouez que 12€ est peu cher payé pour le produit que nous avons la chance d'avoir ici. Oui, je dis "on" ce qui n'est pas très logique, mais voilà.
Après cette belle introduction (non), on se retrouve face à la quatrième partie. Qui marque l'arrivée vers Terra des Mu. Ces derniers (et dernières) sont mené·e·s par Jomy Marcus Shin. Et sa volonté d'offrir un lieu paisible à ses semblables rejoint un peu Keith Anyan, qui vient de mener l'Humanité vers une victoire importante contre les Mu. Le jeune homme va attirer l'attention de Mother, un super ordinateur qui dicte à l'Humanité ce qu'elle doit faire ou non. Le tome s'introduit par le retour triomphant à Terra de Keith, sans que ce dernier ne parvienne à savourer.
Donc, ce tome est composé de la quatrième partie, qui prend quasiment toute la place, un épilogue court, et une galerie de dessins sublimes, en couleur et avec un papier glacé un peu cartonné qui est exceptionnel. Comme prévu, et j'évite de trop en parler, on tombe sur une bataille spatiale épique. Les Mu, avec leurs forces spéciales comptant le très très jeune Tony en leader, vont connaître moult émotions. Victoire, puis lourde défaite. Rien n'est fait pour rabibocher les Mu et l'Humanité. Et j'en ai déjà trop dit.
On va aussi voir comment Keith Anyan arrivera à mener la contre offensive, et l'affrontement final n'est pas celui escompté, mais offre une lutte violente et épique. Petit défait, on se retrouve avec le petit truc en plus, le truc qui était caché encore plus profondément, comme pour prolonger un peu le récit, et expliquer un peu plus la fin. Car honnêtement, comme pas mal d'œuvre de science-fiction de ces années-là ("2001, l'odyssée de l'espace" de Stanley Kubrick est sorti en 1968, soit 9 ans avant ce manga), c'est un final soumis à interprétation. Oui, l'épilogue confirme certaines choses mais il est ultra court, trop court, pour vraiment éclaircir certains points sombres.
Mais parlons avant tout du design. Les vaisseaux sont typés années 70, les personnages semblent proches de l'aspect Shôjô. Fins, élancés, avec des grands yeux, on pense aussi à Maetel de "Galaxy Express 999", pour cet aspect silhouette. Mince, je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire. Mais bon, ça sent les années 70-80, et ce n'est absolument pas désagréable à parcourir. Les doubles-pages sont du plus bel effet, notamment sur la fin, lors de la création des étoiles. Très lyrique, onirique, je n'ai pas le mot, c'est poétique et riche ne émotions suivant votre interprétation.
Le plus fort est que l'on peut comparer Mother à une intelligence artificielle. Ainsi, alors que ChatGPT est capable de faire une dissertation, ou que des vidéos bluffantes créées par intelligence artificielle (I.A.) peuvent alimenter des "fake news" (fausses informations), l'histoire n'a absolument rien de dépassée. C'est un peu comme si demain ChatGPT disait aux dirigeants Humains qu'il faut bannir et anéantir les chauve-souris car elles peuvent communiquer différemment. Je n'ai rien contre les chauve-souris, j'ai juste pas eu envie d'employer une métaphore avec tel ou tel peuple.
On va découvrir d'où vient Physis, et là, ce n'est pas dit spécifiquement. Juste une petite phrase. Et c'est plutôt cool de ne pas trop nous prendre pour des imbéciles. Seulement, la fin se veut trop... comment dire... complexe, ou qui n'en dit pas trop. Alors, oui, on devine ce qu'il se passe, et l'épilogue confirme un truc sur Terra, mais je pense qu'il manque un truc pour vraiment confirmer ce que l'on voit. Je ne dirai pas qui, mais des personnages semblent se changer en étoiles. Du moins, c'est ainsi que je l'ai perçu. Je n'ai pas compris le Soleil qui est comparé à un ballon de football par exemple ? Et ça, ce sont les 3 dernières pages. Bon, j'ai ma propre analyse de cette fin, mais c'est un peu frustrant.
Je pense que j'ai trop l'habitude des œuvres prémâchées. Où tout est expliqué. Regardez "2001, l'odyssée de l'espace", et essayez d'en expliquer la fin. Impossible, c'est tellement soumis à interprétation qu'une personne y verra un rêve, l'autre la mort, ou encore l'atteinte du fin fond de la galaxie par le héros. Et bien ici, dans une moindre mesure, c'est un peu la même réflexion qui nous est imposée. Oui, je pourrai chercher des explications, YouTube, ou même juste internet doivent en regorger, mais ceci m'ôterai une part de mon expérience je pense.
L'important est que le message de vivre en paix pour vivre heureux/heureuses soit parfaitement clair. À quoi bon les morts, les batailles, les essais pour savoir si vous êtes Mu ou Humain ? L'important est d'arriver à s'entendre et de ne pas avoir peur les un·e·s des autres. Et ça, ce message, est limpide comme de l'eau claire. Oui, j'en ajoute beaucoup, mais c'est pour bien que vous sachiez que ce n'est pas qu'une fin complexe. "Destination Terra" est indéniablement une œuvre majeure de la science-fiction. La pure, celle de Arthur C. Clarke, ou d'autres auteurs, autrices, dont j'ignore les noms. Elle force à réfléchir sur notre condition d'humain, d'humaine, encore plus de nos jours avec l'avènement de l'I.A., qui sera le prochain défi majeur de l'Humanité. Ne pas devenir des êtres avilisés par cette même I.A. (désolé, je ne suis pas sûr de la conjugaison du terme "avilir").
Oh, il y a de l'action aussi, j'ai oublié de le dire, mais les batailles sont impressionnantes aussi. Et le manga, dans toute sa continuité, est agréable à parcourir grâce à une découpe de l'action claire. Même si la saga est longue à lire (3 tomes de 300 pages environ), elle est à lire si vous aimez la science-fiction. Les personnages sont attachants, on arrive à comprendre les réactions de Keith, et j'avoue que je ne me souviens plus trop du début de l'œuvre, mais on perçoit assez tôt son humanité. J'ai adoré tout du long et je vous le conseille.
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