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Cultivons la curiosité

Salem - Stephen King

Salem - Stephen King

Après avoir longtemps galéré comme auteur, devant se contenter de faire des nouvelles qui paraîtront entre autre dans Playboy, Stephen King connaîtra le succès avec "Carrie". Son premier roman sort en 1974 aux U.S.A. et est un grand succès. Cette histoire d'une adolescente mal dans sa peau et ayant des capacités de télékinésie qui mettre à feu (et à sang) une petite ville posait les galons du futur maître de l'horreur.

En 1977 il reviendra d'ailleurs avec ce principe de pouvoirs extraordinaires, ce sera avec "Shining". Deux romans que j'ai lu, et qui s'avèrent être de très grande qualité, mêlant habilement vie ordinaire et paisible. Comprenant la stupidité humaine souvent effrayante, à laquelle King apportera une touche de fantastique. Mais aussi et surtout, l'auteur prendra un malin plaisir à faire basculer son récit dans l'horreur pure.

Entre ces romans, Stephen King aura le temps de sortir "Salem", que j'avais occulté. J'ignore pourquoi. Des images de David Soul jouant dans le téléfilm me reviennent, alors que je n'ai aucun souvenir d'avoir vu cette adaptation. J'ignore pourquoi. Tout comme j'ignore pourquoi je ne me suis toujours pas plus intéressé que cela à la mythologie du vampire. Pourtant, le grand fan de "Buffy contre les vampires" que je suis aurait dû approfondir ce thème. En débutant par le classique "Dracula" de Bram Stoker. Et bien non.

Du coup, j'ai profité de mon voyage en train vers Paris (et la Japan Expo 2019) pour plonger dans ce roman, qui va donc parler de vampire. Et qui fait écho à deux nouvelles parues dans "Danse Macabre". C'est rigolo de constater que ce sont ces nouvelles qui me pousseront à prendre le roman. C'est encore plus drôle de constater que ces nouvelles sont présentent dans la version livre de poche que je possède. Un peu comme une version ultime, qui s'offre en plus des scènes coupées. Sans rire, comme dans votre DVD (ou BluRay) de votre film (ou série) préféré(e). Le procédé est rigolo je trouve.

C'est donc parti pour 670 pages hors bonus. D'emblée, on ne comprend pas trop qui sont ces deux personnages, mais on devine qu'ils sortent d'une lutte âpre. Une lutte qui ne semble pas terminée. C'est alors qu'ils décident de retourner au combat que l'introduction s'achève et nous fait revenir en arrière.

Ben Mears connaît un peu Jerusalem's Lot, ou Salem pour faire plus court en français, il y a passé des vacances chez sa tata. Seulement, cela fait une plombe qu'il n'est pas revenu, vu que sa tante n'est plus de ce monde. Ben est un écrivain qui commence à voir sa carrière décoller. Il a écrit trois romans, et ceci prouve que King se projette plus que jamais dans son personnage principal.

Ce retour dans une ville de campagne de sa jeunesse doit redonner l'inspiration à l'écrivain. Et d'emblée il rencontre une jolie jeune femme qui le reconnaît aussitôt. Une rencontre qui fait violemment penser à "22/11/63", et nous verrons que King pose les bases de sa future bibliographie, avec des scènes qui reviendront dans ses futures histoires. Bon, donc Ben mène sa vie, rythmée par ses heures de travail pour son roman et son histoire avec Susan. Seulement, une demeure lugubre ne cesse d'attirer son attention.

Juchée en haut d'une colline surplombant la ville, Marsten's House a une histoire peu commune. De plus Ben semble avoir un passif qui rappellera quelque peu "Ça" (et aussi "20th century boys" pour le coup), mais ceci c'est à vous de le découvrir. Donc, Ben sera surpris de constater que cette maison hantée (inspirée de la Maison du diable d'Amityville, je crois avoir lu ça dans le prologue signé King) a trouvé un nouvel habitant. Straker (Stoker ? ) et Barlow vont en plus ouvrir un magasin de vieux meuble en ville. Qui ne manquera pas de rappeler le Bazaar, futur roman de l'auteur.

Seulement, depuis que cette lugubre maison est habitée, des choses bizarres arrivent en ville. Des animaux sont retrouvés massacrés, des gens tombent malades et ne peuvent plus sortir le jour. Bref, Ben, avec quelques habitants de Jerusalem's Lot, va commencer à croire en l'impossible. Un mal terrifiant a décidé de faire de la paisible bourgade un garde manger (on se croirait dans "L'invasion des profanateurs"). Il va falloir donc lutter âprement. Et ici pas de supers pouvoirs à la Buffy, ni de grande expérience à la Van Helsing, non, les personnages vont devoir sortir leurs tripes pour ne pas succomber à la succube.

Oui, je tente des jeux de mots pourris, sans savoir si j'ai bien raison. En tout cas, dès en 1975, Stephen King s'amuse à conter un quotidien pépère d'un bled paumé. On découvre les personnages doucement, en constatant que derrière le masque, ces derniers sont loin d'être parfaits. J'ai retrouvé du "Dôme" dans la liaison Ben - Susan, mais aussi l'autorité de la ville complétement pétée. Oui, "Salem" pose beaucoup, beaucoup, beaucoup de bases pour King. Tellement que je ne peux pas tout citer.

Le plus intéressant dans le train-train de cette ville, c'est de constater que les personnages ne sont pas manichéens, tout le monde possède ses cadavres dans le placard (je ne sais pas si c'est la bonne expression). Le plus marquant sera cette jeune mère de famille maltraitant son bébé. Qui est elle-même maltraitée par son compagnon. Une famille qui offrira une des scènes les plus choquante du roman.

Mais alors que l'on apprend à connaître tout ce petit monde, deux enfants disparaissent. Ceci est le point de bascule dans l'horreur pure pour une ville aussi tranquille. Un peu comme dans certains films de Danny Boyle, où l'on plonge tranquillement dans l'histoire, jusqu'à presque s'ennuyer avant qu'un événement ne signe cette bascule donc.

Le livre se lit très facilement grâce à une découpe en scène numérotée. Du coup on peut picorer, ou lire un gros chapitre d'un coup (pratique dans le train). Des scènes horribles sont présentent, mais elles me semblent moins spectaculaires que les fins de "Carrie" ou "Shining". Pourtant, les sentiments des personnages ne manqueront pas de vous envahir. Mention spéciale pour Mark, un garçon de 12 ans étonnamment vif d'esprit, mais qui garde quand même sa sensibilité.

Si il n'a pas le niveau d'un "Carrie", "Salem" est pourtant très intéressant à lire. Cependant il manque d'intensité dans son rythme. Un peu comme "Dôme" en vérité. On ne s'ennuie pas, mais il est difficile de rester attentif par moment. Seule la fin élève ce rythme, mais j'ai préféré "picorer" le récit plutôt que de lire 100 pages d'un coup (généralement 20 à 40 pages). De plus, l'horreur n'est pas si pesante que cela. Non, l'ambiance plutôt. Voilà. Une fois de plus c'est à la fin que l'on angoisse enfin, que l'on ressent cette ambiance lourde. Du moins c'est ce que j'ai ressenti. De plus, il n'y a pas de grosse grosse scène (oui, deux fois). Un truc marquant. Allez, si, le coup de l'escalier, là j'avoue avoir eu mal.

Mais sinon, il y a de belles scènes effrayantes, mais qui ne vous feront pas faire des gros cauchemars. Ce qui est dommage, car qui n'a pas l'image des bouches d'incendies explosant au passage de Carrie ? Le final de "Shining" aussi, ou le frisson de la dernière ligne de "Simetierre" ? L'ultime horreur de la fin de "Cujo" aussi, l'image de fin de "Running Man", ou la fin à "deviner" de "Brume" et "Marche ou crève" ?

Pourtant, c'est une belle réussite. Le mythe du vampire revisité par un King froid, qui allonge peut-être trop son récit par moment. D'où ma question, alors que je n'ai pas encore lu les scènes coupées (mais j'y reviens juste après), à quoi bon offrir des scènes rallongées alors que le rythme est déjà assez lent ? Je m'arrête là pour le moment, en attendant de relire les nouvelles, mais aussi ces fameuses scènes coupées. Ce qui me permettra de conclure.

En lisant les 2 nouvelles qui suivent (sur la version "augmentée" chez Le Livre De Poche), "Un dernier pour la route" et "Jerusalem's Lot", je constate qu'elles sont un petit peu plus terrifiantes que le roman que nous venons de lire. Grâce à un rythme intense. La première nouvelle, par son ambiance de tempête de neige, glace le sang. Surtout dans sa partie finale, où l'on ne peut que ressentir de l'empathie pour ce père de famille qui aura laissé involontairement sa femme et sa fille en proie à des prédateurs sanguinaires. Si le gore n'est pas trop présent, le principe de la tempête de neige créé une ambiance pesante, surtout de nuit. Et la fin ne manque pas d'effrayer.

"Jerusalem's Lot", par son positionnement temporaire au XIXè siècle, rappelle Edgar Allan Poe par moment. De plus, ce récit sous forme épistolaire, ramène directement au roman de Bram Stoker nommé "Dracula". Ceci ne gêne en rien la lectrice ou le lecteur, même si j'avoue m'être un peu perdu dans les noms des personnages (Boon, Boone, Charles...). La fin possède une ironie macabre assez délicieuse si on aime l'humour sombre. Quoiqu'il n'y ait pas vraiment d'humour ici. Mais cette nouvelle frôlant les 100 pages ne manque pas de faire frissonner quiconque la lit.

Reste les scènes coupées. Où l'on découvre le premier nom de Jerusalem's Lot, Momson. Si certaines n'offrent pas grand chose. Il y en a quelques unes de vraiment intéressantes et surtout plus gores que le roman lui même. Le coup des rats par exemple, absents du roman (mais qui reviendront dans la nouvelle "Jerusalem's Lot"), impliquant la mort beaucoup plus gore d'un personnage. Terrifiant. Mais aussi ce passage concernant un vampire très très très jeune, où l'on imagine la décomposition.

Enfin arrive la postface, conclusion de Stephen King dans laquelle il revient sur sa découverte de l'œuvre de Bram Stoker, alors qu'il est très jeune (9-10 ans). Une postface passionnante qui se dévore rapidement et permet d'en apprendre un tout petit peu plus sur l'auteur de ce livre.

Si, selon moi, "Salem" n'est pas son meilleur roman, ni le plus terrifiant ou gore, il est tout de même une (re)lecture moderne (dans les années 70, date de sortie de cette œuvre) du mythe du vampire. Si je lui trouve un manque de rythme qui empêche de complétement s'abandonner à la lecture pour se retrouver 2 heures plus tard à ne pas comprendre pourquoi on pique du nez, il est pourtant très plaisant et facile à lire. Il y a des scènes horribles, mais pas aussi barrées ou marquantes que ce que j'ai pu lire avant dans "Carrie" ou juste après dans "Shining". Pire, les deux nouvelles écrites un peu plus tard et disponibles dans "Danse Macabre" sont plus prenantes que le roman lui-même. J'ai oublié de le préciser, mais "Jerusalem's Lot" est nommée "Celui qui garde le ver" dans "Danse Macabre". En lisant la page wikipédia de cette nouvelle, je m'aperçois que j'ai oublié de citer Howard Phillips Lovecraft en plus d'Edgar Allan Poe, notamment via les scènes coupées.

Peu importe que vous lisiez la version normale, ou "deluxe", qui ajoute les 2 nouvelles, permettant au 3 œuvres de faire un tout, l'avant, le pendant et l'après, sans oublier les scènes coupées dont certaines sont plus terrifiantes ou horribles que le roman lui-même. Peu importe la façon dont vous découvrez cette œuvre, elle reste puissante et efficace malgré ses 44 ans. Si en plus vous avez connu.e.s les vampires via les séries-films modernes ("Buffy contre les vampires" ou " True Blood", voire, soyons dingues "Twilight"), vous retrouverez des choses connues. Sachez aussi que ce roman vous donnera envie de découvrir "Dracula" de Bram Stoker. Au final, j'ai adoré le lire, même si je n'ai pas retrouvé le côté "une page de plus" que j'ai avec cette auteur. La faute à un récit long et manquant un tout petit peu de rythme. Ce n'est pas mon King préféré, mais ça reste une œuvre à découvrir. J'ai aimé, voire adoré, sans non plus en garder des scènes puissantes en mémoire. À lire.

@+

P.S. : Je vous invite à lire une chronique mieux écrite et ayant un point de vue différent du mien, par une fan de Stephen King. N'hésitez pas à déambuler sur son blog très intéressant et bien écrit.

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