Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Cultivons la curiosité

Mandibules

Mandibules

Aaah, rappelez-vous, c'était le 21 octobre 2020, mon année au cinéma s'achevait prématurément de fort belle manière avec "Lupin III : The First". Ceci marqua la fin de mon retour dans les salles obscures après le non moins excellent "J'irai mourir dans les Carpates". Il est intéressant de constater que malgré une forme d'aversion, de craintes plutôt, du cinéma français, un autre film venant de l'Hexagone va à nouveau me revoir poser mes fesses sur les sièges en velours de mon cinéma. Plus de 7 mois après, c'est le nouveau film de Quentin Dupieux (que vous connaissez peut-être aussi sous son nom d'artiste musical Mr. Oizo) qui me verra franchir à nouveau les portes pour assister à un long métrage avec des inconnues et inconnus.

Crise oblige, ce fût long. Et comme lors du premier arrêt en 2020, ma crainte de ne pas trouver de films m'intéressant à l'affiche fut grande. Et ça ne manqua pas, le 19 mai 2021, lors de la réouverture, rien ne m'intéressait. C'était prévu, et j'avoue que pourtant, la réouverture par étape me paraît agréable pour un gars peu sociable comme moi. Pensez-y, jauge à 1/3 de la capacité, 2 sièges d'écart minimum, interdiction de manger ou boire pendant la séance. L'assurance d'une vision paisible. Après, vous me direz que je suis un connard de penser que le cinéma c'est de ne pas boire et manger, et vous avez certainement raison. C'est juste que je tombe parfois sur des personnes particulièrement bruyantes quand elles mangent dans leur pot de pop-corn qui n'a pas de fond.

J'avoue avoir failli craquer pour le film "Demon Slayer : Kimetsu no Yaiba - Le film : Le train de l'infini" (comme le titre lolilol), mais n'ayant lu que le premier chapitre du manga, ne connaissant pas l'anime, et ne voyant que la version française disponible (sans parler du défi un peu débile que se passe les ados), bah non. Disons que c'est la file d'attente impressionnante qui me fit faire demi-tour le week-end dernier. J'abandonnais ainsi toute velléité de retourner au cinéma. Ayant trop peur des gens. Je ne sais pas. Mais lorsque je vis que "Mandibules" allait être diffusé, argh, il me parut difficile de ne pas retourner dans les salles obscures.

Ainsi, le 19 mai 2021, Quentin Dupieux, réalisateur, scénariste et directeur de la photographie aussi, sortit son neuvième film. Ce sera mon cinquième film vu du réalisateur. Le deuxième au cinéma après l'excellent "Au Poste !". Fait intéressant, on retrouve Grégoire Ludig. Cette fois-ci le comédien du Palmashow emmène David Marsais chez Quentin Dupieux. Ceci assure la deuxième chose intéressante du film. Voir le Palmashow ensemble à l'écran, sur un scénario que l'on devine décalé de Quentin Dupieux, c'était immanquable pour ma part.

Le film aurait dû sortir en décembre 2020. Bon, qu'à cela ne tienne, il serait de la première vague de sortie de 2021. Et il est vrai que pour aller voir un film du réalisateur, mieux vaut connaître son univers. Mais parlons rapidement du scénario qui va être mis en image durant 1h17. Sachez que je ne savais rien du film. Rien. J'ai tout juste vu les looks un peu "beaufs" de Ludig et Marsais. C'est tout. Donc je suis passé de surprises en surprises.

Une auto un peu sportive, carrée donc typée années 80, descend lentement une allée. On devine que la mer ou l'océan sont en dessous, car le jeune homme stoppe son rutilant véhicule proche d'une barrière. Notre homme voit un vieux matelas, ou un sac de couchage, sur la plage. Il s'y dirige difficilement et réveille la personne à l'intérieur de celui-ci. Telle une baleine échouée, Manu (Grégoire Ludig) peine à s'éveiller. Il se verra confier une mission. Il doit aller chercher une valise chez Michel-Michel, qu'il devra transporter dans un coffre de voiture fermé.

Manu n'est pas très malin, mais les 500 balles promis peuvent l'intéresser, lui qui est en galère. Après avoir trouvé un véhicule (une vieille Mercedes), il se dirige vers la station service tenue par son meilleur pote, Jean-Gab (David Marsais). Les deux amis de toujours vont s'embarquer dans cette aventure qui ne fera que renforcer leur amitié. Surtout quand un évènement, une chose plutôt, inattendu va définitivement changer leur journée, même la semaine.

J'ai fait un choix. Celui de ne pas vous révéler ce qui cause ce bruit dans la Mercedes. Car je l'ignorais. J'espère que vous n'en avez pas trop appris sur le film (la bande annonce vous le révèle), car par sa promptitude et ses évènements, il vaut mieux en savoir le moins possible. Sachez que Manu et Jean-Gab sont un peu simplets, naïfs, mais qu'ils savent obtenir ce dont ils ont besoin. Ils sont assez nonchalants, et me font penser au duo Garth et Wayne de "Wayne's World". Vous voyez peut-être mieux le côté naïf que j'indique plus haut.

Sauf que notre duo lui n'hésite pas à exploiter la moindre faiblesse humaine. Cécile (India Hair) confond Manu avec un ami d'enfance et lui propose l'hospitalité ? Qu'à cela ne tienne, nos deux amis sont dans une grosse galère et s'incrustent chez la femme et ses amies. Il y a aussi le frère de Cécile, Serge (Roméo Elvis). Mais bon, tout semble allez bien, même si la chose peut poser problème. C'est ici que Agnès (Adèle Exarchopoulos) prend la parole, dans la scène qui suit.

Vidéo de Memento Distribution

Et là, devant le film, j'ignorais qui était l'actrice, mais j'étais impressionné. J'avoue. Son jeu est impeccable, c'est impossible de parler comme elle le fait, et j'ai vu un peu de Marina Foïs en elle. Ceci vous donne un peu le ton du film je trouve. Forcément, même si il ne faut pas, c'est tellement décalé que l'on en rit. Surtout devant la mine désabusée de Manu et Jean-Gab. On sent une atmosphère un peu bizarre aussi.

Il va arriver pas mal de choses incroyables à Agnès, qui fera tout pour plaire à Cécile, et essaiera de faire partir Manu et Jean-Gab, jusqu'à découvrir la chose. D'ailleurs, le quiproquo qui s'ensuit est tellement bidon et décalé, que l'on en rit. C'est là où Quentin Dupieux est fort. Dans une situation absolument pas drôle, il arrive à nous faire rire. L'interprétation de Marsais et Ludig est tellement calme, tellement naturelle même, que l'on a une forme d'inertie dans les réactions des personnages. Ils semblent totalement à l'Ouest et le rire vient souvent de ces non réactions justement.

La fin se devine mais est pourtant excellente. Un beau discours, de retour sur une plage comme lors du début du film, on se retrouve heureux et heureuses en sortant du film. D'ailleurs, si vous avez peur de la complexité de Dupieux, sachez ici que c'est son film le plus facile à suivre. Grâce au duo d'acteurs ? Je ne sais pas. J'avoue que l'on revoit pas mal de personnages du Palmashow dans Manu et Jean-Gab. Au point que l'on a du mal à croire que le duo n'ait pas participé au scénario, ou, du moins, à l'écriture de leurs personnages.

Parmi le cast secondaire, seule Adèle Exarchopoulos explose tout. Elle est clairement au dessus du lot, même presque au dessus du duo principal. Elle a un charisme dingue quand-même. Et son rôle n'est absolument pas facile. La réalisation est assez simple, pas d'effet de style, tout juste dans la télévision de la caravane, mais sinon c'est efficace et lisible, donc agréable. Les effets spéciaux sont plus que bluffant. À l'image du Pneu dans "Rubber", on sent le trucage réel. Et c'est bluffant.

Pour un retour au cinéma, ce fût un grand retour. Je n'avais aucune appréhension sur le film que j'allais voir. Marsais/Ludig avec le délire de Dupieux ? Ça ne pouvait que me plaire. Mieux, n'ayant pas pris le soin de me renseigner sur le film, j'en ignorais tout. Et mon plaisir s'en retrouva décuplé. Oui, c'est un peu lent, quoique ça avance mieux que les films habituels du réalisateur. Oui, c'est en total décalage, et on pourra y voir une allégorie de la vie, quand tout est perdu, si tu crois en quelque chose, ça ira mieux. Difficile de plus en parler sans en révéler trop. Mais vous comprendrez en allant le voir.

Car il faut y aller. Vous aimez Quentin Dupieux ? Vous aimerez. Peut-être le trouverez-vous pas assez complexe, mais son humour est là, et c'est du régal à voir. Vous aimez le Palmashow ? Vous retrouverez des personnages bien connus dans les personnalités de Jean-Gab et Manu. Vous aimez les films qui sortent des sentiers battus ? Parfait. Vous aimez l'humour absurde, décalé ? Allez-y. Par contre si vous cherchez un film d'action ou une comédie romantique ? Bah non. Je le répète, même si vous n'aimez pas Dupieux et Marsais/Ludig, ce film est accessible et vous fera vivre une histoire marrante, qui vous divertira le long de ses 77 minutes. J'ai adoré.

@+

P.S. : J'ai oublié de préciser un point qui montre le décalage de Dupieux. On suppose que le film se déroule sur la Côte d'Azur, sans que ce soit nommé. Les voitures sont toutes des automobiles des années 80, pourtant les plaques d'immatriculation sont modernes et on voit des euros passer. Ceci introduit un décalage temporel qui désarçonne un peu. On n'arrive jamais à positionner le film dans le temps et dans un lieu. Pourtant, cette déstabilisation est agréable, presque moelleuse. Je n'arrive pas à l'exprimer, mais j'aime beaucoup que l'on me perde ainsi.

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article