Cultivons la curiosité
Parfois, il est des films que l'on ne voit pas venir. Bon, après, j'avoue ne pas suivre intensément l'actualité cinématographique, tout juste je suis au courant qu'un futur film "La planète des singes" sort début mai. De singe, il en s'agit ici, mais pas sous la même forme. Dev Patel s'est essentiellement fait connaître aux yeux du monde dans l'excellent "Slumdog Millionaire" de Danny Boyle, l'acteur Britannique (aux origines Indiennes) m'aura marqué dans son rôle de Jamal donc, mais aussi celui de Wilson dans "CHAPPiE".
Deux personnages à l'allure chétive, loin de ce qu'il va nous proposer dans sa première réalisation. "Monkey Man" se veut clairement inspiré de "John Wick", par la posture, le costume, la violence des combats, mais aussi le but principal du héros. C'est donc le 23 avril 2024 que sort ce film de 2h00 dans les salles obscures françaises. Essentiellement mis en avant car produit par Jordan Peele, qui sauvera le projet d'une sortie directe sur Netflix. Bien lui en fait, car nous sommes face à un produit cinématographique, qui gagne à être vu sur grand écran. Mais avant tout, bande annonce en version française (VF), soit de la façon dont j'ai vu ce film.
Vidéo de Universal Pictures France
Tout débute en Inde, un combat qui semble clandestin a lieu. Un homme nommé Cobra si je ne dis pas de bêtise, va affronter Kong. Simplement affublés de masques à l'image de leurs animaux respectifs, la lutte est rude. Le singe, qui semble être détesté, fini par perdre de façon douloureuse. On découvre un jeune homme sous le masque. Le Monkey Man du titre du film, bien qu'il n'en porte pas encore le nom, est interprété par Dev Patel. Qui est aussi réalisateur comme je l'ai dit, et co-scénariste avec John Collee et Paul Angunawela. On constate qu'il a pris cher, et va demander son dû à l'organisateur Tiger (Sharlto Copley que j'ai failli ne pas reconnaître). Ce dernier l'arnaque un peu, et on va voir que si notre héros, sans nom en fait, fait tout cela, c'est dans un but précis.
En attendant, il retrouve un jeune garçon qui lui confie des informations sur une dame, qui sera Queenie (Ashwini Kalsekar). On découvrira un peu plus tard qu'il essaie de s'approcher de cette personne pour en atteindre d'autres. Ah, oui, je risque de faire quelques révélations, même si je vais éviter, promis. Le voilà donc plongeur dans un établissement de luxe, où l'élite se fait plaisir, dans tous les sens du terme. Notre héros va essayer de se mettre dans la poche Alphonso (Pitobash Tripathy), homme a tout faire qui essaie de se donner de l'importance mais n'arrête pas de se faire humilier par la pseudo élite.
Ainsi, en combattant la nuit, et en gravissant les échelons de l'établissement de luxe le jour, notre héros approche rapidement son but. Tuer Rana (Sikandar Kher), responsable de son trauma de jeunesse qui le hante encore. Nous ne sommes qu'à la moitié du film, et je vais m'arrêter là. De peur de trop en révéler. Un autre point prend de l'ampleur en parallèle, le gourou Baba Shakti (Makarand Deshpande) devient puissant, au point d'arriver à influencer la prochaine élection. Ceci lui permet de continuer d'asseoir son pouvoir. Il peut ainsi expulser les gens comme il le souhaite, vu qu'il a l'élite du pays dans la poche, et surtout le chef de la police qui est Rana.
Certes, mon résumé est brouillon. Mais c'est de peur de trop en dire que je préfère rester flou. Si on devait rapidement évoquer le récit, c'est une histoire de vengeance. On assiste aux moyens mis en œuvre par notre héros pour s'approcher et arriver à son but. Un but qu'il touchera du bout du doigt, avant de devoir recommencer. Dans une sorte de renaissance spirituelle le faisant aller vers les origines de la culture Hindoue, on y percevra les procédés employés dans les mangas, notamment le nekketsu, où le héros devra s'entraîner et se dépasser. Le passage du sac de riz avec le joueur de percussion est particulièrement marquant et jouissif.
La comparaison avec "John Wick" est obligatoire. Mais on retrouve tellement d'autres inspirations que dire de ce film que c'est "John Wick en Inde" est extrêmement réducteur à mes yeux. J'y ai vu du "Old Boy", une part de Danny Boyle, des films de combats de Hong Kong (pour ne pas dire de Jackie Chan). Ici, on peut évoquer "John Wick", c'est même impératif, mais sans ce que je nomme les "supers pouvoirs". Pas de veste en kevlar anti balle, pas de milliers d'ennemis à neutraliser. Il y a du monde, c'est indéniable, mais quand les adversaires s'avèrent trop nombreux, une assistance est offerte à notre héros.
Le plus marquant, et bien que j'ai vu une tonne de références cinématographiques sans être capable de vous les citer immédiatement, ça reste cette critique de la corruption. La société est pourrie, et les plus puissants ont tous les droits et manipulent les médias. Le gourou et sa communication horrible juste avant les élections est une preuve que la communication peut endormir n'importe qui.
Après, niveau défaut, j'en trouve 2. Pas majeurs, rassurez-vous, mais ils sont là. Déjà, le scénario, bien que correctement construit, pioche de partout. "Fight Club", "Slumdog Millionaire", "John Wick", et j'en passe. Résultat, on peut passer rapidement du film d'action à celui de critique de la société, et il me semble que ça va un tout petit peu trop vite. De plus, on devine tôt la fin. Les combats finaux. Mais ceci ne gêne pas. Par contre, la caméra top gigotante et proche de l'action, c'est plus déstabilisant je trouve. Si nous ne sommes jamais perdu.e.s dans l'action ou la position des personnages, certains mouvements me paraissent en trop et nous font perdre le fil. Bon, c'est une volonté du réalisateur, que l'on ressente le K.O. proche du personnage, mais je trouve que l'espace d'un moment, ça perd.
Ceci dit, c'est pour chipoter que je dis ça, car ce procédé de réalisation permet de ressentir la panique, la fuite du personnage. Quand salement amoché il entame une poursuite dans les rues de Bombay, on constate que sa santé se dégrade à travers des effets de flous et une caméra qui bouge énormément. D'ailleurs, notons que c'est un film à voir absolument au cinéma. Et bien que la VF détonne avec des personnages essentiellement Indiens, elle ne gêne à aucun moment. De plus, les passages en hindi restent tel quel. Ce qui permet de ne pas provoquer un trop grand écart culturel... euh, ce n'est pas ça le mot, bref, ça permet de moins choquer en terme de son.
Voilà le genre de film plaisant à voir au cinéma. Si je n'étais pas aussi attaché à "Spy x Family", je pense même que ce serait ma claque cinéma de 2024. En fait je le préfère à "Spy x Family CODE: White". Car pour ce dernier, ce n'était pas compliqué de me plaire, je connaissais déjà les personnages. J'étais déjà attaché à la famille Forger. Ici, construire un film, en ne nous en dévoilant qu'une partie au début, ce n'était pas chose aisée. Pourtant, le tout jeune Dev Patel (34 ans seulement) s'en sort magnifiquement bien. Dès sa première réalisation, il arrive à nous offrir un spectacle brut de décoffrage, qui en plus se paye le luxe de dénoncer les mauvaises manies des plus puissants.
Égratignant sans vergogne le monde politique, religieux et des forces de l'ordre, à travers la corruption, les plaisirs illégaux que s'offrent les plus riches, tout en montrant le peuple qui galère, Dev Patel arrive en plus à nous offrir un film nerveux. Fortement inspiré des films les plus marquants de ces dernières années, et même plus. Ce qui ne veut rien dire. Mais vous l'aurez compris, si vous cherchez un film, certes prévisible mais pas stupide, qui offre un lot d'action crue, c'est pour vous. On ne voit pas les 2h passer. J'ai adoré, et essayez de le voir si il passe encore pas loin de chez vous, surtout si vous pouvez faire les ponts de vacances à venir.
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